Définir la transformation digitale
La transformation digitale
La digitalisation pourrait être qualifiée de révolution silencieuse (silent revolution, Bunz, 2013 ; Berardi, 2013, pp. 25 - 26 ; Arthur, 2011, p. 1) car elle est composée d’une succession d’usages (Giandou, 2010, p. 173) imperceptibles au quotidien. L’émergence des technologies fait évoluer les postures des acteurs pour traverser différentes phases, de l’évolution à la révolution, jusqu’à la transformation.
Caractéristiques de la transformation digitale
Selon, Besson, Gossart et Jullien (2017) l’expression « digital transformation » est apparue pour la première fois en 2000 « Cette transformation est décrite comme une combinaison de trois phénomènes : l’automatisation, la dématérialisation et la réorganisation des schémas d’intermédiation cette transformation touche tous les processus d'affaires, du business model aux relations avec les parties prenantes » (p. 1). La digitalisation est également caractérisée par l’instantanéité des échanges entre êtres humains et la création de nouvelles opportunités de création de valeur. Dans le rapport Lemoine, (2014), intitulé : « La transformation numérique est la chance que la France doit saisir » (p. 146), Lemoine confirme une transition vers une combinaison de l’automatisation, de la dématérialisation et de la réorganisation des schémas d’intermédiation. Lavayssière, (2015), précise le manque de précision du terme digitalisation « Digital, ce mot est maintenant employé à toutes les sauces et utilisé seul, il n’est pas assez précis » (p. 57). Selon Dudézert (2015, p. 9) « il est utile de distinguer digitalisation et numérisation ». Depuis 1990, la numérisation consiste à archiver et à stocker des documents dans un format numérique, puis à réutiliser ces documents au sein d’une Gestion Électronique de Document ou encore de Programmes de Gestion Intégrée. En 2000, ces systèmes experts (ERP, CRM) ont évolué vers des Intranets puis vers des extranets. Le Web 2.0 a contribué à l’ouverture du Système d’Information de l’entreprise auprès des clients et des différents partenaires. La digitalisation est caractérisée par la transformation de l’organisation et sa maturité digitale, combinaison qui lui permet de transformer son modèle d’affaires.
Pour définir le terme digital, Lavayssière (2015) le présente sous deux acceptions différentes et néanmoins très liées : « il se définit d’abord comme la génération nouvelle d’outils techniques et de méthodes de traitement des données, de présentation de ces données et de leur transmission, ou autrement dit, l’apport des technologies d’Internet (notamment les standards W3C – World Wide Web Consortium dans le traitement de l’information) ; – la deuxième définition, fondée partiellement sur les effets de la précédente, regroupe les nouveaux instruments, interfaces/outils de communication physiques ou virtuels comme les smartphones, les X-blets (tablettes de différentes formes), les réseaux sociaux, les agents intelligents, etc » (p. 57). La révolution digitale est donc une transition vers de nouveaux outils et méthodologies numériques. Les technologies numériques de traitement de données transforment les usages et modifient en profondeur les comportements humains. Les technologies digitales utilisent pour leur part de nouveaux environnements afin d’accélérer et simplifier les traitements des données. L’intégration et l’interopérabilité des données clients conduisent à l’émergence du customer centric : les désirs des clients sont au cœur du business model, et les données pilotent le nouveau système d’affaires.
Selon Charrié et Janin (2015), « l’économie numérique présente quatre spécificités : la non-localisation des activités, le rôle central des plateformes, l’importance des effets de réseau et l’exploitation des données massives. Ces caractéristiques la distinguent de l’économie traditionnelle, en particulier par la modification des chaînes de création de valeur qu’elles induisent » (p. 67). Le phénomène de la digitalisation pourrait donc se définir à partir de la masse de données brutes valorisées par des algorithmes ou des intelligences artificielles pouvant être sécurisées par des technologies telle que la blockchain. L’interface logicielle est accessible par l’intermédiaire d’une infrastructure informatique communément dénommée : plateforme web. Ces plateformes ont comme avantage de déployer un effet réseau dans un espace web communautaire. Ce nouveau business model est typique de la ré-intermédiation digitale car il capte, déplace et concentre la valeur de l’écosystème ainsi créée.
En complément de l’analyse de Charrié (2015), cinq éléments permettent de caractériser et ainsi de clarifier la digitalisation :
· La non-localisation des données : la digitalisation décentralise les activités du commerce et les rend accessible sans limite géographique. La transformation digitale contribue à la reconfiguration de l’environnement.
- Des données brutes captées, valorisées, fiabilisées et sécurisées par ces technologies et utilisées par une communauté d’utilisateurs. Selon Lesca (2008) « Les informations de veille et les signaux de l’environnement peuvent être recherchés, captés, mémorisés, diffusés et exploités grâce aux technologies numériques » (p. 19) voir également Revelli (1998) et le Général Pichot-Duclot (1994).
- Une plateforme, des logiciels et des algorithmes qui sont des technologies implémentées, des services logiciels déployés dans un environnement numérique, généralement une plateforme (Parker et al., 2016).
- Un effet réseau (web 2.0) coordonné au sein d’une infrastructure technologique et humaine caractérisée par une communauté d’utilisateurs qui collaborent afin de créer de la valeur sur la plateforme. Le business model des plateformes, conjoint à cet effet réseau, met en évidence le modèle de la désintermédiation typique d’un modèle d’affaires numérique. Ce business model digital capte généralement toute la valeur de l’écosystème.
- Un business model de ré-intermédiation digitale : cette approche dynamique des modèles d’affaires reconfigure les processus de l’organisation et il digitalise les tâches de faibles valeurs ajoutées. Les acteurs de l’entreprise se concentrant sur la satisfaction du client et l’expérience clients ou utilisateurs (UX).
La transformation digitale n’est donc pas « que » la numérisation de l’entreprise (Dudézert, 2015, 2017, 2018). La digitalisation consiste à faire évoluer l’activité de l’entreprise (processus, relation clients, business model, structure organisationnelle, flux d’information) dans un monde digital et interconnecté : c’est une transformation identique à la précédente révolution industrielle qui a reconfiguré l’économie artisanale en 1.0 de l’époque vers une économie industrielle dans une logique de consommation de masse. Dans son article Krishnan, (2002) clarifie la notion de Web 2.0, trop axée à ses yeux sur la notion de e-commerce. Il renomme d'ailleurs ce dernier en e-Business afin de mettre en valeur la notion de transformation digitale : « La transformation numérique est le processus par lequel une entreprise devient un e-business. L’E-business est inextricablement lié au Web et à la distribution d'informations en formats numériques. La transformation numérique se réfère à la conversion de toutes les informations - texte, images, audio et vidéo - en formats numériques pouvant être échangés, stockés, indexés sous forme de bases de données. Il y aura des changements aux processus métier qui leur seront associés. Par exemple, les informations précédemment échangées sous forme de texte sur papier, telles qu'un formulaire de commande, peuvent maintenant être échangées sous la forme d'un fichier numérique et distribuées simultanément à plusieurs « abonnés », sans être préalablement copiées. À l'échelle de l'entreprise, la transformation numérique englobera les quatre C » (p. 4).
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